paysage.JPGPour la deuxième exposition personnelle de Gaëlle Chotard à la galerie, on retrouve avec un plaisir délicieux la technique très particulière qui la caractérise : un mode de tissage - crochetage extrêmement précis et subtil, dont la méticulosité génère renflements et échancrures dans des volumes qui évoquent ce que les organes humains et les végétaux ont en commun : réseaux de veines & racines, organes & bulbes, alvéoles des poumons & poches gonflées des algues…

Ces formes, dont Gaëlle Chotard est coutumière, sont identifiables en tant que style, mais jamais une composition n’est vraiment comparable à une autre, tant varient les parts de vide et de pleins de chaque pièce, leurs façons d’être plutôt plante ou plutôt chair translucide.

Si pour sa première exposition personnelle, les sculptures lumineuses présentées dans l’obscurité soulignaient la sensation d’intériorité, ces nouvelles œuvres ont davantage de prise d’air, s’épanouissent, elles s’étalent. Gaëlle Chotard étire ces mêmes réseaux textiles, ces mêmes maillages métalliques jusqu’à en faire le tracé, creusé par sa propre ombre sur le mur tout proche, d’un vallonnement figuratif. Devant ces lignes tubulaires, on se prend à vraiment voir une succession d’horizons, oubliant presque les coutures qui les assemblent : on découvre ainsi comment des détails organiques nous plongent dans un vaste paysage.

De bourgeonnements en étirements de la trame vers l’évocation de larges étendues, elle en vient à choisir dans un paysage photographié une trouée de lumière, une étendue d’eau où gît un ciel reflété, dessinant une forme sans nom, qu’elle traduit pour y répondre en tissage et en négatif. Ainsi, l’image immédiatement lisible s’accompagne d’un réseau de fils et d’évocations, on reconnaît sans reconnaître, on s’interroge. La représentation photographique d’un instant météorologique est complétée, racontée à nouveau par la temporalité inverse du travail manuel, de la composition du « tissu » protéiforme tendu à son côté.

Sculptures suspendues, la série des Cendres est en ordre dispersé, comme des lianes qui descendraient librement de la canopée, avec les iridescences et les moirures éteintes de tons d’automne.

Les dessins quant à eux nous aident à percevoir comment Gaëlle Chotard transforme les sillons délicats de l’encre de Chine sur papier en volume. Ils deviennent notamment dessins-sculptures délicatement posés sur le mur, dont seul le tracé suggère l’expansion comme nouvelle forme de mobilité. Ils ont, de par leur dessin, l’air d’être promis à se ramifier.