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La vie devant soi
exposition anniversaire

31 août - 30 octobre 2024
Vernissage samedi 31 août 
avec 13 galeries de la rue Chapon

Après 35 ans...
Berdaguer&Péjus, Grégoire Bergeret, Cathryn Boch, Brodbeck & de Barbuat, Gaëlle Chotard, Céline Cléron, Erik Dietman, Luka Fineisen, Hreinn Fridfinnsson, Joël Kermarrec, Mehdi-Georges Lahlou, Charles Le Hyaric, Frédérique Loutz, Raphaëlle Peria, Dieter Roth, JC Ruggirello, Elsa Sahal, Linda Sanchez, Didier Trenet, Sabrina Vitali, VOID.

Au fil du temps...

Günter Brus, Michael Buthe, Tony Carter, Michael Craig-Martin, Johan Creten, Lotta Hannerz, Jürgen Klauke, Philippe Parreno, Sigmar Polke, Françoise Vergier.



Galerie Papillon : poésie, humour et dérision
by Élisabeth Couturier - Art Press June 1st, 2023 n°511



La Galerie Papillon est une affaire de famille lancée en 1989 par Claudine Papillon, la mère, rejointe en 2007 par la fille, Marion Papillon, qui est aussi présidente du Comité professionnel des galeries d’art. 

"Les galeries font toutes le même métier, mais pas de la même manière", constate Marion Papillon. On ne saurait mieux dire. Codirectrice avec sa mère de la Galerie Papillon, la jeune femme d’une quarantaine d’années est, par ailleurs, présidente depuis 2019 du Comité professionnel des galeries d’art et créatrice de Paris Gallery Weekend. Lucide, elle déclare : "Notre enseigne est une vieille galerie puisque nous avons fêté nos 30 ans en 2019, mais aussi aux prises avec les nouvelles règles du jeu. Pour garder nos collectionneurs, nous devons relancer la demande, prendre des risques, élargir les propositions, sans pour autant trahir notre singularité". Effectivement, dans le paysage français, le 13 rue Chapon à Paris se distingue par la constance de ses partis pris, grâce à l’actualisation permanente d’un état d’esprit placé sous le signe de la liberté créatrice d’artistes francs-tireurs.
Pourquoi ne trouve-t-on pas, vissée à côté de la porte d’entrée, une plaque indiquant "Galerie Papillon & fille" ? “Outre que ce n’est pas l’usage dans le commerce de l’art, répond Marion, aujourd’hui le nom d’une galerie équivaut à une marque." Lorsqu’il y a 16 ans, elle décide de venir travailler officiellement avec sa mère, leur association se traduit par un changement discret de nom mais seulement 9 ans plus tard, en 2016 : la Galerie Claudine Papillon devient tout simplement la Galerie Papillon. Question de respect pour la fille : "Je ne voulais pas que le long chemin accompli par Claudine disparaisse". Un chemin qui commence par une dizaine d’années auprès de Ninon Robelin, fondatrice de la galerie Bama. Puis, en 1989, soutenue par plusieurs artistes prêts à la suivre, elle ouvre son propre établissement, la Galerie Claudine Papillon, dans un grand espace rue de Turenne. Mais 6 ans plus tard, la crise liée à la guerre du Golfe l’oblige à vendre les murs. L’aventure continue cependant dans des lieux plus petits. En 2004, Claudine s’installe dans l’espace que nous connaissons aujourd’hui. Et Marion de poursuivre : "Aussi, pour beaucoup de collectionneurs, nous représentons une forme de stabilité. Et même si nous ne sommes pas vraiment ciblées par les investisseurs, notre longévité peut rassurer la nouvelle génération d’acheteurs qui généralement garde à l’esprit l’idée de ne pas perdre d’argent." Les deux femmes, déterminées, refusent la course effrénée au chiffre d’affaires mirobolant. Ce n’est ni leur terrain de jeu, ni leur but. Parlons d’une entreprise familiale de taille moyenne qui parvient à se maintenir à flot, et qui tire ses revenus, grosso modo, à 30% des foires, à 50% des expositions en galerie, et à 20 % de leur fonds. "Les expositions où l’on ne vend rien sont rarissimes. Mais, néanmoins, lorsqu’il nous arrive de connaître un moment difficile, nous faisons comme nos confrères qui ont un long parcours, nous vendons une œuvre historique", avoue Claudine.

PARIS AUDACIEUX
Éveiller la curiosité du visiteur leur tient à cœur. Proposer une parenthèse différente à l’amateur d’art constitue leur challenge. Une sensation de bien-être saisit celui-ci lorsqu’il pénètre dans les locaux clairs, situés au fond d’une jolie cour pavée du Marais. Des propositions originales et des accrochages subtils l’invitent à prendre son temps. Ici, chaque œuvre et chaque exposition nourrissent un fil rouge que Claudine résume ainsi : "poésie, humour, dérision“. Et d’ajouter : "Mes goûts sont toujours allés vers les œuvres reflétant des univers très personnels, plutôt à la marge. J’aime les bricoleurs." Elle confesse : "Je n’ai jamais voulu consacrer la galerie à la seule peinture, même si j’ai exposé à mes débuts Sigmar Polke, Jean-Michel Alberola ou encore Patrick Caulfield que je tiens pour de très grands peintres. J’avoue avoir un penchant pour les artistes multimédia, ceux qui jouent avec les matières." Faut-il y voir l’influence d’Erik Dietman, sculpteur et dessinateur post-dada de génie, qui fut son compagnon durant plus de 20 ans, jusqu’à sa mort en 2002 ? Et qu’elle exposa régulièrement. Dieter Roth et Hreinn Friðfinnsson, autres perturbateurs notoires de genres et de catégories, furent aussi de la partie. La relève est aujourd’hui assurée par Berdaguer&Péjus, Gaëlle Chotard, Cathryn Boch, Céline Cléron, Jean-Claude Ruggirello, Elsa Sahal, le collectif VOID ou encore Didier Trenet. Autant de trajectoires singulières, d’expérimentateurs obsessionnels, d’inventeurs irrévérencieux. "J’ai avancé avec détermination, tout en m’en remettant aux hasards", s’étonne encore Claudine, avant de préciser : "J’aime comprendre comment un travail dialogue avec l’histoire de l’art et j’ai gardé intact le goût des accrochages. J’aime aussi vendre à des particuliers, tu es sûre de partager tes choix avec quelqu’un. Pas plus tard qu’hier un client, qui a économisé depuis 4 ans, est venu acheter l’œuvre qu’il avait repérée : un livre d’Erik Dietman dont la couverture est en sparadrap. Un moment émouvant pour lui comme pour moi."
Comment la greffe a-t-elle pris lorsque la fille est venue rejoindre la mère ? "Par chance, explique Marion, nous sommes très complémentaires. Je suis arrivée en connaissant bien la galerie, mais avec une autre façon de travailler car je venais de la communication exercée dans le secteur culturel et j’avais la maîtrise de l’informatique, pourtant, nous n’avons jamais eu de problèmes de fond. Nous défendons actuellement 24 artistes. Un tiers sont historiques et ont suivi Claudine. Les autres sont des choix communs. Si l’une de nous deux ne le sent pas, on laisse tomber." Claudine poursuit : "D’une manière générale, on ne se fâche pas avec nos artistes car leur liberté nous importe avant tout. Lorsque nous nous séparons, ça se fait naturellement. C’est parfois parce que le travail change ou que nous constatons réciproquement que la collaboration ne porte plus suffisamment ses fruits." Un mélange de sérénité et de clairvoyance se dégage de notre entretien. Malgré un passé solide et reconnu, elles savent que l’avenir s’écrit au présent : "Nous sommes dans un monde très difficile, remarque Marion. Au moment où la scène française commence à intéresser les collectionneurs internationaux, nos artistes ont besoin de visibilité. D’où la nécessité d’être présent sur des foires. Et pourquoi pas imaginer ouvrir une succursale à l’étranger." Un pari audacieux ? Le signe que rien n’est jamais acquis.